Mon parcours – partie 5

Mon parcours – partie 5

Nous voilà donc en 2019. Je suis enceinte, passé les 3 premiers mois ça se passe plutôt bien. Je termine la collection avec un bidon énorme et en pleine canicule. Ce qui me vaut de préférer venir travailler à la cave de la maison que nous avons achetée bien que tout soit en travaux, au moins je suis au frais ! Je fais aussi un peu de paddle et du sup yoga jusqu’à la veille de mon accouchement. J’essaie de m’organiser au mieux pour être “prête” quand bébé sera là.
Je tiens quand même à revenir sur un dernier point concernant le sujet grossesse qui peut intéresser les entrepreneuses. Attention à votre CA pour vos indemnités. J’ai été mal renseignée en début de grossesse par 2 entités différentes qui m’ont assurées que j’aurai le taux plein, soit 55,5€ par jour de congé mat et les primes au 7e mois et à la naissance. Au final je n’aurai que 10% de cette somme. Pourtant j’ai cotisé les 3 années avant puisque j’étais embauchée, mais allez savoir pourquoi (c’est un flou intersidéral pour avoir une explication claire évidemment), mais ils ont jugé que mon CA était insuffisant. Pour le coup c’est sûr qu’en étant immatriculée que depuis le mois d ‘octobre je ne risquais pas d’exploser les plafonds, encore moins après l’abattement de 70% et des poussières qu’ils font sur la somme finale. Je vous passe les détails mais voilà, si vous êtes dans mon cas il faudra composer en touchant 5,55€/jour durant votre congé maternité…Ceci explique pourquoi nombre de femmes à leur compte reprennent le travail quasiment dès la naissance, oubliant complètement de se chouchouter durant le fameux mois d’or qui suit un accouchement. Bref. Mon petit garçon est arrivé avec un mois d’avance mais il allait bien, c’est là le principal.

N’oublions pas que j’espérais aussi ouvrir Potamo’ en mai, projet repoussé en novembre finalement puisque avec un nouveau né ça paraissait compliqué et les travaux avaient pris un peu de retard. Potamo’, c’est un lieu que j’ai imaginé comme un cocon. Cocon déjà pour moi en y prévoyant mon atelier. Créer dans ce local avec cette vue sur la rivière Tarn, beaucoup de gens qui sont venus vous diront que c’est le pied. Un cocon aussi pour les autres créateurs. En effet l’espace est grand, je ne me voyais pas remplir l’espace seule d’une part, mais aussi le faire seule. J’avais vraiment envie d’exposer les savoir-faire locaux, en orientant la sélection sur l’artisanat, l’artisanat d’art aussi, les choses faîtes avec passion, patience, amour du métier et des matières nobles. Un point essentiel était aussi l’éco-responsabilité, que ce soit dans la philosophie de la marque, dans la façon de travailler, dans le choix des matières…C’est un axe qui, à mon sens, ne peut plus être mis de côté, et ce dans n’importe quel projet. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons choisi des peintures bio-sourcées, et que le bois brut est partout, essentiellement avec de la récup de palettes, de meubles chinés à Emmaüs etc. Certains présentoirs sont neufs faute de les avoir trouvé en brocante, mais on a vraiment fait notre maximum pour respecter cette notion de Nature et de responsabilité envers la planète. Et avec un tel écrin ouvert sur le Tarn je pense qu’on n’avait pas le droit de faire autrement, ne serait-ce que par respect pour cette vue incroyable.
L’ouverture était prévu pour fin novembre. J’ai donc dû m’occuper de la décoration, de la sélection des créateurs, de toute la gestion qui va avec, en même temps que je m’occupais de mon tout petit. Honnêtement je n’ai pas grand chose à dire sur cette période parce que je n’en ai aucun souvenir. Je devais être bien trop fatiguée pour être consciente de ce qu’il se passait. Je me souviens en revanche de l’inauguration. C’était la période d’avant, celle où on ne parlait pas de masque, de virus, celle où on pouvait s’embrasser et tenir à plus de 50 dans le local. Et c’était vraiment une chouette soirée.
Depuis Potamo’ est devenu une association qui rassemble un joli petit nombre de créateurs, et je suis vraiment heureuse de voir la tournure que ça prend. Nous continuons d’exposer une vingtaine de créateurs par session, nous proposons des ateliers créatifs pour venir découvrir certains savoir-faire, nous avons commencé des cours de yoga qui j’espère pourrons se poursuivre à la rentrée, et nous offrons aussi un espace de co-working où les créateurs en besoin d’échange ou de changement d’air sont les bienvenus. De plus en plus de visiteurs nous rendent visite, toujours au rendez-vous malgré la situation sanitaire et les nombreuses fermetures. Espérons qu’à partir de septembre on puisse dire qu’on est là pour de bon ! J’ai souvent ouvert avec bébé lorsqu’il tenait encore en place dans son petit transat ou dans mes bras. Les clients l’ont vu grandir et je trouve ça hyper émouvant. Maintenant il court partout et leur parle, c’est fou.

Et depuis j’ai envie de vous dire que la vie est passée dans la moulinette du temps, je ne sais pas ce qu’il s’est passé mais subitement nous sommes 2 ans plus tard. Nous avons eu plusieurs confinements, j’ai continué de créer de nouvelles collections de bijoux tout en allaitant, je dois avouer que mon cerveau a buggé je n’ai plus les idées claires sur tout ce que j’ai fait en 2020. Je me souviens avoir dû demander de l’aide (merci la famille), avoir été très fatiguée, avoir eu l’impression que je n’y arriverai jamais. Me demander comment j’allai pouvoir continuer la création maintenant qu’un petit humain dépendait de moi et me prenait tout mon temps. J’ai beaucoup douté, me suis accrochée, ai eu envie de tout lâcher des centaines de fois.
Contre toute attente mon bilan 2020 est plutôt bon, bien meilleur que ce que ce que je pensais. Alors je repars pour continuer comme ça en 2021. Et puis re-confinement. Et puis épuisement global. Le monde des créateurs a été cette fois je crois vraiment touché. Nos client.e.s sont blasé.e.s, déprimé.e.s, ils achètent moins de créations et de long mois de doutes s’installent. En juin je suis, je crois, très proche du burn out. Je décide que soit je trouve d’autres créatrices qui ont envie de s’investir autant que moi dans Potamo’ et donc me soulager dans mon emploi du temps, soit j’arrête. Quand on y pense je ne sais pas comment j’ai fait. Déjà tenir une marque et les 1000 casquettes qui vont avec, c’est pas simple (créa, production, gestion des stocks, compta, réseaux sociaux, shooting, sav, site etc…). Multipliez ça par deux avec la gestion de Potamo’, ajoutez-y un enfant dans ses premières années de vie, qui est gardé à la maison (et donc gestion des siestes-couches-tétées-pleurs-temps d ‘éveil etc…), et vous me retrouvez presque 2ans plus tard en juin. Carpette. Lessivée comme jamais.
Cet épisode passé proche de la catastrophe m’a quand même apporté plusieurs choses très positives. Déjà il m’a permis de cerner que le plus important pour moi malgré tout c’était mon bébé, ma famile. Ca parait bête mais ce n’est pas le constat que tout le monde aurait fait. J’ai préféré faire moins pour mon entreprise et privilégier ma famille pour un temps, car je le sais, ce temps passe vite. Il ira très bientôt à l’école, à l’université ou que sais-je. Et je serai pour toujours heureuse de ces souvenirs qu’on se construit. Ensuite j’ai vraiment compris cet adage “seul on va plus vite, ensemble on va plus loin”. J’arrive à tout faire seule, j’arrive à gérer et être efficace. Mais à quel prix ? Et au final il y aura toujours une limite que mes capacités m’empêcheront de dépasser. Du coup j’ai accepter avoir besoin d’aide, j’ai accepter déléguer, faire de la place à d’autres, prendre leurs remarques en considération pour qu’ensemble on aille plus loin avec Potamo’ et nos marques respectives. Un gros big up à Aurore de Ninoucou et à Morgane de Mythologiae qui sont mes anges gardiens sans qui j’aurais vraiment tout lâché. Une infinie gratitude envers ces deux créatrices brillantes et passionnées, je leur souhaite tant de belles choses. Je vous invite d’ailleurs à aller voir leurs créations si vous ne les connaissez pas déjà !

Tout ça pour dire qu’accepter notre défaillance, nos limites c’est parfois compliqué, ça demande un vrai travail sur soi. Mais au final c’est pour le meilleur. Il ne faut pas hésiter à demander de l’aide quand on en a besoin. Facile à dire, c’est sûr. Même si sur le moment ça vous paraît impensable, que vous êtes trop fier ou timide. Stop. On y va et on avance. Je ne regrette pas du tout mes errances, je ne regrette pas du tout mon épuisement, je ne regrette pas d’avoir été têtue pour ensuite avouer être proche de l’échec. Tout ça fait avancer. L’échec fait avancer. Et qui ne tente rien n’a rien mais aussi ne rate rien. Alors soyez fier quand vous avez raté quelque chose, ça signifie que vous avez essayé et ça c’est vraiment courageux !

Mon parcours-partie 4

Mon parcours-partie 4

Quand je tenais l’atelier de Mélanie, j’ai pu exposer mes premiers bijoux. Ils étaient en laiton, parfois en laiton et argent. Elle m’avait poussée à les exposer bien qu’ils ne soient pas dorés, car ça permettait de tester les clients, d’avoir leurs avis sur le design etc… Honnêtement ça a été hyper difficile pour moi d’oser les exposer dans la belle boutique de Ohlala, notamment parce que tous les autres bijoux étaient plaqués or ou en argent massif, et du coup je trouvais que les miens ne faisaient pas finis. J’ai cependant vite eu de bons retour sur leur design ce qui était déjà un bon début. Mais j’ai aussi vite remarqué que les clients qui venaient dans cette petite boutique un peu cachée de la rue, y venaient spécifiquement pour les bijoux Ohlala (et c’était bien compréhensible). Je crois que je n’ai rien vendu d’ailleurs de mes créations, mais ça a été très formateur pour la relation client. Je les observais, je voyais vers quoi la majorité se tournait, je discutait avec eux. Mes années tourisme faisaient que j’avais un bon relationnel. Petit à petit j’osais dire que je me lançais moi aussi et je leur demandais leur avis sur mes créations.
Le constat a été assez vite clair, si ce n’était pas doré les gens n’achetaient pas. Pourtant le laiton est un métal qui se patine, au même titre que l’argent. Quand on le porte il ne bouge pas forcément mais il fera des traces vertes sur certaines peaux. Aux USA il est très répandu dans les bijoux, les clients aimant sont côté doré vintage que j’aime moi aussi beaucoup. Mais en France c’était de l’or ou rien.

C’est alors qu’à commencé la recherche d’un doreur. Et au mon dieu on m’avait prévenu mais alors que c’était compliqué. Entre ceux qui font au poids, ceux qui font pour un minimum de x pièces par modèle, ceux qui veulent bien faire des tests pour qu’on voit la couleur finale, ceux qui refuse et c’est la surprise, ceux qui ne veulent que nous rencontrer en personne (et qui bien-sûr sont à Paris)…Bref le parcours du combattant. J’ai fini par en trouver un qui me fait un placage de qualité, je ne peux pas le nier. Mais par contre notre relation n’est pas des plus fluide et cordiale et ça je trouve hyper difficile pour la sensible que je suis. J’ai remarqué que dès que j’ai terminé une collection et que vient le moment de l’envoi à la dorure, je suis dans un stress monumental d’avoir mal fait quelque chose, qui me vaudrait encore un appel en furie comme j’ai déjà pu recevoir…Je n’ai qu’à changer me direz-vous. Certes. Mais là je n’ai vraiment pas le temps ou l’énergie de repartir à la recherche d’une autre perle rare et de toutes les phases de test que ça implique.

Revenons-en à nos bijoux. Je trouve mon doreur, je commence à faire des marchés de créateurs et à vendre mes créations. Quand je repense à mes premiers stands..ça aussi c’est vraiment en l’expérimentant qu’on se fait la main. Au départ j’avais juste une nappe et les bijoux posés à même la table…Pas franchement sexy. Petit à petit j’ai investi dans des présentoirs et de la déco, des cartes de visite, des écrins…et les marchés de Noël que j’ai pu faire se sont vraiment bien passés. C’était encourageant.

En parallèle de tout ça je décide de m’offrir une formation 200h de professeur de yoga. Pas forcément pour enseigner à la base, mais pour vraiment explorer cette pratique et m’y dédier pendant 1 mois entier. J’en ai trouvé une à Chamonix, chez moi, et qui plus est en anglais, le rêve pour moi. En avril je pars donc un mois en mode yogi, un des mois forcément les plus intense de ma vie tant physiquement qu’émotionnellement. Je perds mon papi début mai (celui qui m’a inspiré les cartes raconte-toi si vous avez suivi). Très dur mais je suis entourée par toutes ces femmes merveilleuses. Elles me “dédient” un yoga nidra (c’est un peu comme une méditation guidée) pour m’aider à m’apaiser et il s’est passé une des choses les plus étranges de ma vie. La prof nous parle de nos ancêtres et cie, petit à petit je me sens de mieux en mieux, ma peine est comme aspirée hors de moi, je me sens plus légère, presque bien. On termine la séance, je m’assoie et je découvre qu’une bonne partie des autres élèves est en larmes. La prof nous dit que ça arrive parfois dans les groupes très soudés et qui ne savent pas encore bien se protéger, on prend la peines et les problèmes des autres. C’était très étonnant, surtout pour moi qui suis plutôt cartésienne. Bref. Je suis diplômée et j’enchaîne avec une autre formation pour donner des cours de yoga sur stand up paddle (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué lol). L’été je donne des cours dans l’association de Paddle que j’ai monté avec mon chéri (ah oui je n’ai pas parlé de ça…) et c’est vraiment une activité géniale pour rester centré. Si on a le malheur de penser à autre chose qu’au moment présent on est quasiment assuré de tomber. Tout ça c’est bien joli mais ça ne paie pas les factures puisque je le fais bénévolement. Je n’ose pas encore donner des “vrais” cours de mon côté et en même temps je n’ai pas envie de faire des remplacements en studio. Du coup je laisse un peu de côté en prévoyant une dernière formation de Yin Yoga pour la fin de l’année, et une autre de Prénatal début 2020.

Arrivée au terme de mon contrat avec la SCOP et comme les ventes de mes bijoux commençaient à bien marcher, je m’immatricule à la Chambre de Métiers et de l’Artisanat. On est fin octobre 2018. Je commence ma dernière formation de yoga qui s’étalait sur plusieurs week-end. Nous étions un tout petit groupe de 5 il me semble. Je n’accroche pas trop avec la prof, c’est un peu compliqué pour moi d’observer sa façon de faire avec nous sans rien dire mais comme à mon habitude je ne dis rien pour éviter le conflit. Et puis vient ce week-end où, tout la matinée on se lance des regards interrogateurs entre nous, la prof n’est pas du tout dans la bienveillance en tous cas ce jour là. Arrive la pause de midi, et d’un coup d’un seul une envie de vomir horrible. Un gros mal de crâne, ça ne va pas du tout. Je finis par vomir dans la rue comme un lendemain de cuite, derrière une poubelle (la honte), chose qui ne m’est jamais arrivée de ma vie. Je mets ça sur le compte de la frustration que je ressens envers l’enseignement qu’on reçoit et me dis que je suis vraiment grave de réagir comme ça. Finalement l’histoire dira que j’étais enceinte mais que je ne le savais pas…ahaha. Dans la même période mon cher et tendre signe pour son premier achat immobilier, un immeuble de ville où tout est à faire. Je ne vous dis pas l’accumulation. On dit souvent que tout arrive en même temps, pour nous ça s’est vérifié et je me demande encore comment on a fait pour traverser tout ça…Ce sera le sujet du prochain épisode je pense, 2019-2020.

Tout ça pour dire qu’en vérité on a beau tout prévoir, se dire qu’on s’organise et qu’on va faire ça ça et ça dans tel ordre, rien ne se passe jamais comme prévu. Il faut accepter les aléas qui ne sont pas toujours négatifs au final. J’ai tendance à me dire que rien n’arrive par hasard, que chaque événement, positif comme négatif, au final c’est comme un panneau qui nous indique le bon chemin. Et même lorsque c’est difficile à vivre et qu’on ne comprends pas pourquoi on doit traverser cela, on se rend compte un jour que sans cet événement marquant on n’en serait pas là où on est et qu’il fallait que ça arrive. J’avoue que je n’ai pas encore tout compris du pourquoi des choses qui me sont arrivées, mais je sais que ça viendra avec le temps. Je vous souhaite une belle semaine et vous dis à lundi prochain !

Mon parcours – partie 3

Mon parcours – partie 3

Suite à cette première expérience de voyage en solo, j’ai vraiment eu envie de privilégier cela pendant un temps. J’ai donc repris un boulot de saisonnier qui n’avait rien à voir avec le design, et en hors saison je partais. Argentine, Canada, Thaïlande, Bali à nouveau…Des voyages formidables, je mesure encore plus ma chance d’avoir pu voir tout ça avec la période que nous traversons en ce moment.
Et puis quand même au bout d’un moment, l’appel de la création s’est fait ressentir. Je me suis remise au dessin, chose que je ne fais plus du tout mais une des seules activités que je peux faire pendant des heures sans voir passer le temps. J’ai rencontré mon amoureux du sud-ouest, j’ai fini par lui proposer de venir dans sa région, et de fil en aiguille j’ai commencer à me faire une raison. Je ne trouverais jamais de boulot dans la bijouterie ou le design. Donc soit je m’y mettais moi-même de mon côté, soit j’oubliais l’idée. J’ai donc commencé à vraiment dessiner des modèles de bijoux, j’ai fait des maquettes, j’ai testé des choses mais vraiment rien de commercialisable.
Dans le même temps j’ai repris un boulot d’accueil dans une entreprise d’ingénieurs. Le CAUCHEMARD. Je devais être tirée à quatre épingles tailleur-talons-chignon, pour ceux qui me connaissent, la blague. Au bout de plusieurs semaines sur place on ne retenait toujours pas mon prénom, et pour finir j’ai été accusée de vol, c’était le pompon sur la Garonne! J’ai pris mes jambes à mon cou. En fait avec le recul je me dis que c’est l’univers qui voulait me faire comprendre que je n’avais rien à faire à cet endroit. Après ça j’ai eu la chance que mon dossier soit accepté par la région pour être formée au graphisme. Je m’étais dit qu’à défaut de design, le graphisme restait dans la création et comme je maitrisais déjà bien la suite Adobe, pourquoi pas. 6 mois qui ont été vraiment top, j’ai appris plein de choses dans cette petite école de Montauban, et à la sortie je me sentais enfin légitime pour un poste, avec un vrai nom de métier : graphiste.
J’ai été prise finalement dans une mairie, où le nom de mon poste était “chargée de communication” mais où, au final je faisais surtout du graphisme. Je pense honnêtement que je faisais le travail d’au moins deux personnes. Cela dit je ne regrette pas non plus parce que j’ai pu vraiment me faire la main, j’ai vu mes affiches imprimées en grand dans toute la ville, j’ai eu en charge la mise en page de documents vraiment complets d’une vingtaine de pages, j’ai dû gérer les relations avec les imprimeurs, les différents services, les élus etc…Bon ce n’est un secret pour personne, je ne me suis pas non plus sentie vraiment à ma place. Le monde des fonctionnaires m’a un peu fait penser à la grosse boîte de mes débuts, je me suis vite sentie oppressée dans ce système. C’est tout de même une bonne expérience qui m’a montré qu’une de mes faiblesses (qui dure encore à ce jour) c’est que j’ai du mal à poser des limites, à dire non. Une vraie phobie du risque de conflit et du conflit en lui-même.
En parallèle, l’envie de faire une collection de bijoux avait grandi, je voulais vraiment tenter pour pouvoir me dire qu’au moins j’avais essayé. J’ai commencé des prototypes en bois à la découpe laser, un tout autre style comme vous pouvez le voir. J’aimais beaucoup le principe mais par contre dépendre du Fablab où je faisais découper les pièces, sans pouvoir prendre de rendez-vous, c’était source d’une grande anxiété pour moi. Je faisais 1h de route sans savoir si j’allai pouvoir utiliser la machine…C’est aussi à ce moment là il me semble que j’ai décidé de reprendre les outils grâce à un stage que j’ai trouvé par hasard sur internet. J’ai donc fait la connaissance de Mélanie aka Ohlala Bijoux. Et là comment dire. Son atelier, sa bienveillance, la bague lotus que j’ai créé avec elle…tout m’est revenu et j’ai su, c’était vraiment ce que je voulais faire.
Je suis donc rentrée dans une SCOP pour tester mon activité de créatrice de bijoux avant de me lancer avec mon propre numéro de siret et compagnie. J’ai eu l’opportunité aussi de tenir l’atelier de Mélanie pendant son congé maternité, et ça c’était vraiment chouet pour être sûre de ce que je voulais ou pas.
Encore une fois je dirais que si on écoute les signes ou son intuition appelez ça comme vous voulez, tout se goupille. Et quand on s’entête à ne pas écouter, je crois vraiment qu’on se met dans des situations compliquées, désagréables et tout sauf sereines. Et puis quand on est sûr, quoi qu’il arrive on trouve la force et les moyens de réaliser ses rêves.

Mon parcours – partie 1

Mon parcours – partie 1

Mon parcours – Partie 1 : Les études –

Cet été j’ai eu envie de vous en dire un peu plus sur mon parcours avec des petits chapitres, étape par étape. Ca pourra peut-être aider certains d’entre vous qui cherchent leur orientation ou qui ne savent pas comment s’y prendre. Vous verrez que tout est possible et que tout est question de choix 🙂

On démarre avec mon parcours après le BAC ES que j’ai obtenu avec mention assez bien. Ca n’a pas une grande importance pour la suite mais c’est une petite victoire quand même !

J’ai commencé par me diriger vers le tourisme parce que j’aimais le contact avec les gens et j’adorais par dessus tout parler anglais ou toutes autres langues étrangères. J’ai des notions en allemand, espagnol, italien, brésilien et russe, mais c’est une autre histoire ! Après 6 mois d’université en Langues Etrangères Appliquées, j’ai abandonné car ce n’était vraiment pas un système qui me convenait. Trop de liberté dans le planning, on reprenait les bases j’avais clairement l’impression de perdre mon temps, et je ne me suis pas du tout fait à la vie dans une grande ville comme Lyon.

La rentrée d’après j’ai trouvé une école sur Genève qui formait le personnel navigant ou d’hôtellerie, Tunon. Je n’ai pas forcément aimé tous les cours mais j’ai rencontré de très chères amies avec qui je suis toujours en lien. J’ai aussi eu la chance de faire un stage à l’office de tourisme de Chamonix, et ensuite de faire des saisons dans cette structure pendant plusieurs années. C’était génial même si le contact avec certains clients était compliqué (surtout les français, bizarre..). Toutes mes collègues étaient comme des amies, je les aime énormément et je pense que c’est très rare pour un milieu féminin. Je parlais donc anglais toute la journée et je faisais découvrir aux gens les beautés de notre vallée que j’aime tant. Mais un jour je me suis quand même dit que la création me manquait et après de longues heures de remise en question, j’ai décidé de reprendre mes études.

D’abord avec une MANAA (mise à niveau d’arts appliqués), année que j’ai détesté avec une prof limite tortionnaire qui voulait du sang et des larmes ou rien (ahh les Beaux-Arts…). Pas mon truc. Mais grâce à ça j’ai eu mon concours d’entrée pour la Haute Ecole d’Art et de Design, la HEAD, de Genève. S’en sont suivi 3 années dans le département design produits option bijouterie. J’étais la seule élève qui n’avait pas de qualification technique, tous les autres avaient déjà fait au moins un CAP ou équivalent. Autant dire que ça m’a pas mal freiné dans ma confiance en moi, mais j’ai quand même réussi à m’en sortir, à apprendre les bases sur le tas et avec l’aide des autres élèves. Et puis je tirais mon épingle du jeu grâce à ma créativité qui était clairement mon point fort.

Si je ne dois retenir qu’un événement de ces trois années, ce serait notre collaboration avec la marque de chaussure brésilienne Mélissa. Nous devions réinventer la chaussure. J’ai vraiment mis longtemps à trouver mon concept, mon dieu que j’ai galéré. J’ai fini par créer un module dont la forme était basée sur les étoiles présentes sur le drapeau brésilien. Ca symbolisait les liens qui unissaient ce peuple si ouvert et festif. On pouvait composer sa chaussure en imbriquant les modules les uns dans les autres. J’ai mis des heures à repercer chaque trou après la découpe laser qui ne fonctionnait pas toujours. Bref, beaucoup de nuits blanches et un jury plus tard, j’obtiens une note plutôt bonne, je suis contente. Et puis quelques temps plus tard la nouvelle tombe. L’équipe de Mélissa a produit 3 modèles et va les présenter à la Fashion Week de Rio. Wahou. Et là une élève du département mode me croise et me dit « Félicitations pour Mélissa ! ». Je ne comprends pas je lui dis qu’elle doit confondre parce que j’étais loin d’avoir eu la meilleure note. Et elle décrit mon projet en disant que non c’est bien celui-ci avec le sien et celui d’une autre collègue. Je me rappellerai toujours lorsqu’on me l’a annoncé officiellement, et surtout lorsqu’on nous a dit que Mélissa nous INVITAIT A RIO pour l’occasion !!!! Je ne sais pas comment vous décrire la sensation que ça m’a fait mais j’étais en pleine hallucination. Voilà comment j’ai fini sur des talons de 15cm à la Fashion Week de Rio, comment j’ai découvert mes chaussures en vrai (je ne les ai jamais trouvées pour les avoir à la maison en souvenir), et comment j’ai eu la chance de visiter Rio, le Corcovado, la plage, les bars…un merveilleux souvenir.

J’ai ensuite obtenu mon diplôme avec une note plutôt moyenne, mon travail étant trop commercial et pas assez contemporain. L’important était de l’avoir n’est-ce-pas ? Ce petit article c’est pour dire qu’il ne faut pas attendre d’avoir toutes les connaissances, tous les diplômes, toutes les certitudes pour y aller. Si vous avez une envie, quelque chose que vous sentez profondément, allez-y même avec le minimum de connaissance. L’important c’est la volonté d’apprendre, d’y arriver, la capacité d’adaptation. Le reste viendra, faites-vous confiance. Si on attend que tous les feux soient au vert pour entreprendre quelque chose il y a fort à parier qu’on ne se lancera jamais.

J’ai ensuite trouvé un poste de designer pour la rentrée suivante, mais c’est une autre histoire pour la semaine prochaine…

Mon parcours – partie 2

Mon parcours – partie 2

Après avoir obtenu mon Bachelor Design Produit, me voilà donc sur le marché du travail. Je trouve un job d’été dans un centre équestre. Au passage une de mes plus belles expériences jusqu’ici. J’ai tellement aimé avoir un travail physique où je devais sans arrêt bouger, où j’avais fini par créer une vraie relation complice avec les chevaux. Cet été là une offre d’emploi sort pour une marque de sport dont les bureaux techniques sont à 5 minutes de chez moi. Sans grande conviction je postule, et je suis prise ! Je me retrouve donc à la rentrée avec un emploi de designer textile junior. Moi qui n’y connais rien (encore une fois) en stylisme, je me retrouve au département chaussettes et coiffants. Une expérience très intéressante qui m’a fait réaliser beaucoup de choses. La première c’est que je ne me sens pas bien du tout dans une grande structure. On était là dans une organisation type grand groupe avec des réunions dans des salles de spectacles immenses pour se féliciter des ventes département par département, avec prix remis au designer dont les produits avaient le mieux marchés, feux d’artifices et compagnie…Pour beaucoup de gens ça doit être très sympa mais alors moi comment vous dire…Je suis quelqu’un qui bosse vite et bien, mais dans mon coin, alors devoir cadrer dans un groupe comme ça où la première question qu’on te pose c’est « et toi tu fais quel sport dans la vie ? » alors que je faisais juste du ski de pistes l’hiver et du yoga, quand les autres faisaient des expéditions, de la haute montagne et tutti quanti…Je me sentais un peu ovni, j’avais du mal à trouver ma place dans l’équipe. Malgré tout comme je travaillais plutôt bien, on a fini par me proposer le saint graal, un CDI. Un poste de designer textile junior, à la sortie des études, j’étais la seule de ma classe à l’époque à avoir trouvé cette opportunité si vite. Et devinez ce que j’ai répondu ?

Merci mais non merci.

En vrai quand on me l’a proposé j’ai tout à coup eu le sentiment d’étouffer, que je n’allais plus jamais bouger de là et que j’allais finir ma vie à me sentir pas à ma place au milieu de tout un tas de gens cool et sportifs que je mettais un peu sur un pied d’estale, il faut bien le dire. Et puis honnêtement, je voulais créer des objets, pas des vêtements. Pour le coup je ne me sentais pas légitime du tout. Donc ma première réponse a été de demander un poste au département design produits. Mais il n’y avait pas de place.

Du coup j’ai dit non.

Et j’ai pris un billet d’avion pour Bali avec pour seule certitude la date de retour qui se ferait un mois après le départ.

Et comme personne ne se motivait pour partir avec moi, j’ai décidé de partir seule.

Je ne vais pas faire ma warrior, les trois premiers jours ont vraiment été difficiles à vivre. Mon copain de l’époque m’avait offert les deux premières nuits dans un super bel hôtel pour que j’ai un pied à terre en arrivant. Avec le décalage horaire je me retrouvais réveillée en pleine nuit à paniquer sur les jours à venir car je n’avais absolument rien prévu. J’ai même fini par appeler mes parents en larmes à 4h du mat en leur demandant pourquoi ils m’avaient laissée partir comme ça. Les pauvres. Ils ont vraiment dû s’inquiéter. Ce premier contact avec Bali ne m’a pas plu parce que les hôtels de luxe c’est beau, mais c’est vide d’échanges. Les gens se faisaient dorer la pilule du matin au soir, j’étais entourée d’européens, il n’y avait rien de traditionnel ou en lien avec les locaux dans ce coin. Bref pas du tout ce que j’avais imaginé. J’ai fini par prendre un taxi que j’ai payé un prix exorbitant puisque je ne savais pas encore la valeur des choses là-bas et j’osais encore moins négocier quoi que ce soit. Et j’ai atterris à Ubud. Bonheur. A l’époque c’était vraiment un petit village avec certes des magasins pour les occidentaux, mais aussi beaucoup de choses traditionnelles, des temples, des locaux, des cérémonies…J’ai adoré Ubud.
Un jour j’y ai pris un cours de bijouterie histoire d’apprendre les techniques locales. Ça a été très surprenant, c’était en gros les mêmes outils mais tenus de manière différente. Les mêmes techniques avec un angle d’approche différent et j’ai trouvé ça génial car ça m’a ouvert l’esprit sur plein de choses. Il n’y avait finalement pas qu’une seule façon de faire, comme il n’y pas une seule façon de penser. Ma collection Balimood est née lors de ce voyage, en tous cas les premiers motifs. Elle est complètement tordue et asymétrique, justement parce qu’avec mes aprioris d’occidentale je pensais coller mon motif sur la plaque comme on me l’avait appris, puis ensuite faire la découpe intérieure en suivant le même motif collé. En fin de compte j’ai juste pu découper la forme extérieure avant que mon professeur ne brule le dessin pour le faire disparaître de ma plaque. Bref. J’adore cette bague même si elle est complètement imparfaite. Elle symbolise tant de choses ne serait-ce que par la façon dont elle a vu le jour.

C’est aussi à Ubud que j’ai rencontré Audrey avec qui j’ai partagé pas mal de jours de voyage, dont la découverte des îles Gili, un vrai paradis sur terre en tous cas à l’époque. Je ne vais pas vous retracer le mois entier ça durerait des pages. Mais par contre ce mois-là restera gravé à jamais. Parce que un mois entier LIBRE, où on n’a aucune obligation de rien, ça peut faire peur au début mais en vrai, c’est un sacré luxe. Dormir, manger, danser, nager, rire, discuter, lire, découvrir, apprendre, écouter, rencontrer…Quand est-ce-que dans nos vies à 100 à l’heure on peut vraiment se le permettre ? J’ai pu nager avec des tortues, un rêve, j’ai fait mes premières plongées bouteilles, j’a dansé sur des plages jusqu’à ce que le soleil se lève, j’ai ri comme je n’avais pas ri depuis trop longtemps, j’ai eu aussi quelques petites frayeurs mais rien de bien méchant, j’ai rencontré des gens du monde entier dont je me souviens encore des prénoms tant ils m’ont marqués. Je suis encore en contact avec certains d’ailleurs (poke Audrey et Juanda). J’ai vu les deux plus beaux couchers de soleil de ma vie, toujours pas détrônés depuis. J’ai eu un véritable coup de cœur pour cette culture, ce peuple balinais, leurs paysages, leurs nourritures, leur philosophie, bref vous l’aurez compris je ne regrette absolument pas cette expérience et j’ai même versé ma petite larme au moment de décoller pour rentrer. Parce que j’étais consciente que cette parenthèse enchantée n’était qu’une parenthèse, et que j’allai retomber dans cette vie de fou qu’on mène en France.

Qu’est-ce-que j’allai faire de ma vie ? Comment ? Où ? Avec qui ? (Oui parce qu’entre temps mon cher et tendre de l’époque m’a largué par mail pour la petite anecdote ahah ). Autant de questions qu’on est tous amené à se poser un jour ou l’autre et que je me pose encore parfois. Mais de faire cette pause m’avait quand même apporté des réponses. La création m’appelait, les bijoux aussi. Le voyage et la perte de repère, c’était vraiment là où je me sentais libre, bien, et vivante alors que ça peut paniquer beaucoup de monde. Mettez moi dans un endroit inconnu où on parle une autre langue et je suis la plus heureuse. Je me sens comme Indiana Jones prête à décrypter les signes et indices que la vie m’envoie et à découvrir foule de nouvelles choses qui, je le sais, m’inspireront.
Vous pouvez peut-être mieux comprendre maintenant pourquoi j’aime tant la collection Balimood et pourquoi mes créations ont toujours une symbolique associée. Je pense que ce désir de sens est né là-bas, au milieu des rizières et des cocotiers.

Moralité de cet épisode, savoir écouter son intuition est une force. Se laisser guider par elle demande du courage, beaucoup de courage, mais quand on fait le premier pas on est très vite rassuré. Et surtout, quand tu n’écoutes pas l’univers, l’univers se met en quatre pour te faire comprendre les choses que tu dois intégrer. Ce sera le sujet du prochain article, rendez-vous lundi prochain !